Jeux demain

Ce sera pas vilain

Vous êtes désœuvrés et le sevrage complet de foot qui suit l’Euro est difficile à accepter ? Carton-Rouge a ce qu’il vous faut. Avant d’envoyer un de ses ignobles scribouillards à Lyon pour suivre 6 matches du tournoi olympique de foot féminin, la rédac’ vous explique les tenants et aboutissants d’une des compétitions ne se déroulant pas qu’à Paris (ouf !) et pour laquelle il était logistiquement et financièrement possible de se procurer un billet et même de dénicher un hôtel sans attirer l’attention de l’office des poursuites.

Mais attendez… les filles jouent au foot ?

Bienvenue au troisième millénaire, cher lecteur-boomer ! Elles participent même aux Jeux depuis 1996 à Atlanta, ceux du centenaire. Cette année-là, la liste des nouvelles disciplines comprend le softball, le beach volley, le VTT, l’aviron, une compétition par équipes de gymnastique rythmique ainsi que la natation et l’escrime féminines. C’était en effet le dernier moment pour se rendre compte que le siècle avait débuté…

Le thème musical de 1996 avait quand même de la gueule.

Au fait, si vous trouvez que les villes françaises dans lesquelles les matches auront lieu cette année (voir ci-dessous) sont quand même un peu éloignées les unes des autres, try this for taste: il y a 28 ans, nos pionnières du foot féminin aux JO étaient disséminées entre Miami, Orlando (Floride), Birmingham (Alabama, veillez à me prononcer ce « h » et à me rallonger ce « a »), Washington, D.C. et… Athens (non, l’autre, en Géorgie – oui, aussi l’autre). Vous vous souvenez du nom de la ville-hôte ? Nous non plus.

Vous pensez que l’extrême droite avait quelque chose à redire à la présence d’une Canadienne francophone à la cérémonie d’ouverture ? Y’a pas moyen ?

On vous rassure, tout le reste était prévu de manière on ne peut plus logique. Il n’y avait par exemple que deux groupes de 4 équipes qui se nommaient… « E » et « F ».  

On imagine qu’à Paris, cet hymne sera remplacé par « Paname » de Guillaume Hoarau.

C’est quand ?

Du 25 juillet au 10 août. Tout commencera donc exactement un mois et demi après la fameuse division des droites en France (même si ce n’est là qu’un segment de la saga). De là à dire que Pedro Sánchez sera tenté de dissoudre les Cortes Generales de son pays en cas d’échec cuisant d’une sélection espagnole dont tout le monde prédit la Reconquête écrasante, il n’y a qu’un tacle glissé.

C’est où ?

Aux Jeux olympiques de Paris 2024 pardi ! C’est-à-dire presque partout et aussi un peu dans la capitale quand même. Bordeaux, Lyon Décines-Charpieu, Marseille, Nantes, Nice et St-Étienne seront les six autres villes-hôtes de ce tournoi.

Qui a gagné il y a 4 ans 3 ans à Tokyo ?

Le Canada avait décroché l’or en 2021 en battant la Suède aux tirs au but alors que les Etats-Unis en avaient fait de même avec l’Australie pour le bronze. La rédac’ de CR est prête à pronostiquer devant notaire qu’au moins trois de ces équipes n’atteindront pas le podium cette année (bon OK, pour la Suède, non qualifiée, on triche un peu quand même).

Jordyn Huitema (19) et Jesse Fleming (17) risquent bien d’être de la partie pour défendre leur titre cette année.

Et d’habitude, qui gagne en général ?

Les Etats-Unis sont le pays le plus titré (4 médailles d’or, une d’argent et une de bronze) devant l’Allemagne (une médaille d’or et trois de bronze), le Canada (une médaille d’or, deux de bronze), la Norvège (une médaille d’or, une de bronze), la Suède et le Brésil (deux médailles d’argent). On mentionnera encore le Japon et la Chine avec une deuxième marche du podium chacun. L’Australie et la France se contentent pour l’instant de chocolat, ce qui est peu pratique au vu des températures qui règnent dans notre hémisphère en été.

Carli Lloyd vient de marquer en finale contre le Japon à Londres 2012.

La Suisse n’a jamais participé aux JO féminins et n’a plus décroché de médaille chez les hommes depuis… 1924 à Paris justement (argent).

Qui est qualifié ?

La France, nation organisatrice et donc qualifiée d’office, a été rejointe par 11 pays émanant de six continents. Une fois n’est pas coutume dans ce genre de grosse compétition, l’UEFA se contentera de trois représentants en tout et pour tout, issus du Final Four de la Ligue des Nations. Pas besoin d’avoir fait l’ENA pour comprendre que la Nati ne sera pas de la fête. Et pourtant sans Yakin et avec des latérales*, on aurait eu nos chances.

*Vanne écrite avant le début de l’Euro masculin. Elle a monstre bien vieilli.

On ne vous explique pas comment les ressortissants de CONCACAF, CONMEBOL, AFC, (E)AFF, OFC, CAF et autre COSAFA (bonne question en effet) ont fait pour composter leur billet pour Paris parce qu’on n’est pas WAFU non plus (et on a franchement la flemme).

Ah, on allait oublier: contrairement à son pendant masculin, ses équipes de moins de 23 ans et ses âpres négociations avec les clubs pour tenter avec un succès comparable à celui du Nouveau Parti Anticapitaliste aux Européennes d’incorporer un maximum de trois joueurs plus âgés, le tournoi féminin se dispute sans limite d’âge. Les équipes-types devraient donc être de la partie et apporter au tableau dames un élément auquel on ne s’attendait plus aux JO en termes de foot: de l’intérêt.

Comment ça marche ?

Trois groupes de quatre (qu’on a décidé d’appeler « A », « B » et « C » à la stupeur générale). Les deux premiers de chaque groupe ainsi que les deux meilleurs troisièmes se qualifient pour les quarts de finale. Un jour il faudra quand même qu’on nous explique pourquoi on ne se cantonne pas à des multiples de huit pour éviter ce genre de formule presque aussi bancale que la gestion de la billetterie de Roland-Garros.

Non, parce qu’en plus cette histoire de meilleurs troisièmes ne complique pas du tout la formation d’un tableau menant à la finale au Parc des Princes, bien au contraire:

Merci à Wikipédia d’avoir compris tout ça pour nous. En ce qui nous concerne, on a décidé de traverser ce pont quand on y arrivera, et pas avant (oui, cet article est sponsorisé par le Grand Dictionnaire des Anglicismes à la Con, ce qui n’est pas plus débile que Visit Qatar après tout).

Les groupes

Groupe A:

France 🇫🇷

Colombie 🇨🇴

Canada 🇨🇦

Nouvelle-Zélande 🇳🇿

La joueuse à suivre: Linda Caicedo, désignée meilleure joueuse de moins de 21 ans évoluant dans un club européen (le Real Madrid) en 2023, éclaboussera ce groupe de sa classe. D’autant qu’elle sera un peu moins surmenée qu’en 2022/2023, saison lors de laquelle elle avait disputé trois (!) Coupes du monde (M17, M20 et senior) et deux Copa América (M17 et senior) avec des buts à la clé dans les trois compétitions intercontinentales et un malaise assorti d’un évanouissement dans la dernière.

On vous avait parlé de sa nomination au Prix Puskás du but de l’année ?

Le pronostic de ChatGPT: Le Canada et la France feront valoir leur expérience de tenant du titre et leur droit du sol de pays organisateur et se qualifieront dans cet ordre directement pour les quarts. À ne pas confondre avec le car, puisque la suite de la compétition ne se déroulera pas à Knysna pour Hervé Renard et ses joueuses. La Colombie se contentera de la lutte pour figurer parmi les meilleurs troisièmes. « Les matches eux-mêmes seront décisifs pour déterminer le classement final », nous rappelle-t-on à toutes fins utiles. 

Groupe B:

Etats-Unis 🇺🇸

Zambie 🇿🇲

Allemagne 🇩🇪

Australie 🇦🇺

La joueuse à suivre: La Zambienne Racheal Kundananji, transfert le plus cher de l’histoire du foot féminin (partie sans crier gare de Madrid CFF, un club sur la bonne voie, pour rejoindre le bandwagon du Bay FC pour 805’000 € en février dernier). Détail amusant, les numéros 2 et 3 de ce classement seront aussi présentes aux Jeux puisqu’il s’agit d’une autre membre des Copper Queens, Barbra Banda (de Shanghai Shengli à Orlando Pride pour 681’000 € en mars) et de Mayra Ramírez (de Levante à Chelsea pour 500’000 € en janvier), engagée dans le groupe A avec Las Chicas Superpoderosas colombiennes. Selon nos savants calculs, ces trois montants additionnés équivalent à un peu plus de 7 jours de salaire pour le smicard Kylian Mbappé.

Le pronostic de ChatGPT: Aucun risque pour notre IA préférée, plat du pied sécurité: les Etats-Unis et l’Allemagne passeront parce qu’elles sont de loin les plus titrées, un point c’est tout. L’Australie profitera de son expérience pour chiper la troisième place – potentiellement également qualificative par les poils – à la Zambie.

Groupe C:

Espagne 🇪🇸

Japon 🇯🇵

Nigeria 🇳🇬

Brésil 🇧🇷

La joueuse à suivre: Tarciane. La défenseuse centrale de 21 ans et 1m83 sous la toise vient de quitter Corinthians pour rejoindre Ramona Bachmann au Houston Dash pour 453’000 € (plus gros transfert brésilien de l’histoire, cinquième plus grosse transaction au niveau mondial et l’équivalent d’une semaine de dur labeur saoudien pour N’Golo Kanté). Ramona et Tarciane ont d’ailleurs un autre point commun puisque la native de Belford Roxo (oui, c’est un bled de l’état de Rio de Janeiro qui a pris le nom de l’ingénieur qui a résolu son problème de manque d’eau en 1889) a été lancée en équipe A auriverde par une certaine Pia Sundhage en octobre 2022.

Le pronostic de ChatGPT: Le saviez-vous ? « Les résultats des matches eux-mêmes détermineront le classement final du groupe. » Mais s’il faut vraiment donner une prédiction, notre interlocuteur robotisé nous avoue volontiers une préférence pour l’Espagne championne du monde en titre et vainqueur de la Ligue des Nations, suivie par le Brésil et le Japon. Le Nigeria est donc foutu.

Non non, on a fait exprès.

 

Crédits photographiques:

Les médailles canadiennes: Douglas O’Brien/CC0/Flickr https://flickr.com/photos/95969344@N00/51668020261

Carli Lloyd: Joel Solomon/CC0/Flickr https://www.flickr.com/photos/52755208@N00/7751372000

A propos Raphaël Iberg 187 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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8 Commentaires

  1. Il fallait oser écrire « le sevrage complet de foot qui suit l’Euro », alors que le championnat suisse a recommencé le week-end passé. Le problème du calendrier footballistique masculin actuel, ce n’est pas le sevrage, c’est l’absence de sevrage. C’est encore plus dur d’y faire une place pour le foot féminin du coup..

  2. Juste, on est sur un site sérieux ici quand même, la vanne est mal venue. Je vais donc répondre au premier degré, comme il se doit: évidemment que biologiquement un homme va plus vite et est plus fort et plus puissant, même dans un championnat aussi faible que la Super League. Sans parler du fait que le foot masculin n’a pas été interdit presque partout entre 1920 et 1970, ça aide à se développer. Malgré ça, techniquement parlant, une Linda Caicedo n’a rien à envier à… euh… non, vraiment, je n’y arrive pas, je ne connais aucun nom du championnat de Suisse masculin que je n’ai pas suivi depuis au moins 15 ans. Bref, tout ça pour dire que les JO féminins c’est vachement plus intéressant à suivre que le foot masculin et que le niveau intrinsèque ne fait même pas partie de la conversation en fait. Les joueurs de l’Euro masculin étaient tous de très haut niveau en juin, et pourtant qu’est-ce qu’on s’est fait chier.

    • Je suis d’accord qu’un haut niveau technique (théorique) ne garantit pas plus de spectacle ou un suspens plus haletant, et qu’il est tout à fait possible que les JO féminins soient plus plaisants à suivre que l’euro ou nombre de compétitions masculines. Et d’accord aussi que le foot féminin amène une fraicheur que le foot masculin, en tout cas de très haut niveau, n’amène plus.

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