(Très) amicalement vôtre

On n'a pas couru à Smilla l'heure

Comme Cyril Hanouna, Cristiano Ronaldo ou encore Kylian Mbappé, vous passez un été un peu difficile et avez du mal à vous remettre d’une déchirure des ligaments de l’ego ayant nécessité une intervention chirurgicale à l’étranger ? En plus vous avez raté les traditionnelles Journées du Papier Découpé de Château-d’Oex, si cruciales à votre mental en carton ? Qu’à cela ne tienne, on vous propose une mise au vert dans un stade qui faisait la fierté de notre coin de pays au tout début de la guerre froide et qui sert maintenant principalement de bouclier anti-canicule et de refuge aux clubs et compétitions méprisés par l’ASF.

Le match en deux mots

T-shirt weather.

À la Pontaise.

Bon dieu.

Bon, on rigole, mais après la neige de Lucerne, la grêle de Zurich et la pluie de Bienne, on désespérait de revoir ce genre de météo un soir de match.

D’accord, on a presque dû enfiler la petite laine (comme ici) en deuxième mi-temps, mais il fallait bien trouver une excuse pour cet habile placement de produits estampillés Carton-Rouge.ch.

La femme du match

Smilla Vallotto. 4 “l”, 2 “t”, 3 classes au-dessus de la mêlée et suffisamment de percussion pour former un brass band à elle seule. Entrée à la mi-temps, l’Helvético-Norvégienne – qui fait décidément honneur au mythique numéro 14 qu’elle porte – a allumé pétard sur pétard depuis son côté gauche. On imagine qu’aussi loin du 1er août une dérogation a tout de même été nécessaire. De son accélération de la 63ème minute à son assist 15 minutes plus tard sur coup franc (Viola Calligaris, 2-0, enfin !), on a adoré cette Vallotto mobile.

La joie des Suissesses et des tribunes en délire sur le 2-0.

Mentions également à Noëlle Maritz, Lydia Andrade, Ana-Maria Crnogorčević (un poteau, une latte et le 3-0 de la 88ème minute) et Géraldine Reuteler notamment, qui ont eu le mérite de prendre ce match excessivement amical un poil au sérieux quand même.

On note aussi le nom de Sydney Schertenleib ici pour plus tard. Entrée à la 74ème minute pour Andrade, la Zurichoise de 17 ans n’a pas eu le temps de montrer toute l’étendue de son talent, mais sa prestation de vendredi dernier avec un but à la clé face à la Turquie et son transfert vers la réserve du FC Barcelone cet été nous font dire qu’il faudra retenir ce patronyme. D’ailleurs, comme dirait Fred Scola, « elles ont des noms compliqués mais ça joue simple quand elles sont ensemble Crnogorčević et Schertenleib ».

La leşyeyən du match

Oui, « buse » en azéri. Aucune idée si ce mot est masculin ou féminin dans sa langue d’origine, mais peu importe, votre site satirico-sportif favori est de toute manière connu pour sa neutralité à toute épreuve.

D’autres volatiles – clairement disposés en 4-4-2 – s’étaient rapidement emparés des 16 mètres suisses.

Bref, notre leşyeyən donc ? Livia Peng, pardi. Pia Sundhage avait décidé de la titulariser dans la cage helvétique pour la première fois depuis son arrivée à la tête de la Nati en janvier et autant vous dire qu’elle n’a rassuré personne. Son arrêt des tibias sur une frappe anodine décochée depuis le dernier rang de la file des toilettes (21ème) et un corner fabriqué de toutes pièces par la portière du Werder Brême sur une passe en retrait il est vrai passablement foireuse (42ème) n’inciteront peut-être pas sa sélectionneuse à retenter l’aventure de sitôt. Le tout à notre plus grand désarroi et celui des amateurs de jeux de mots explosifs et autres détonations en tous genres.

Allégorie du futur de Peng en équipe nationale.

Le tournant du match

Le moment où l’horaire du coup d’envoi a été défini. 19h. C’est-à-dire six heures après le coucher du soleil et le lever de la bise noire dans les Plaines-du-Loup. Col roulé et manches longues obligatoires pour les joueuses (oui, on se contredit un peu dans cet article, faites pas attention).

Sans compter le surmenage causé par les encouragements aux mecs via FaceTime tous les soirs pendant l’Euro entre les hymnes et le coup d’envoi. 

L’instant baklaVAR du match

Alors écoutez, la Pontaise a trop d’autres problèmes à régler avant de même imaginer installer la VAR. Liste non exhaustive en images:

Pour atteindre le family corner, situé en plein trou du U du monde, il faut préalablement traverser le local poubelles et la loge du concierge. Pratique. Le soupirail du haut donne probablement directement sur le vestiaire adverse alors que les plaques genevoises de ce véhicule appartenant manifestement au SLO resteront inexpliquées.

Vous croyez avoir atteint votre place ? Que nenni ! Il faut encore traverser les DOUVES du stade à la nage. La Seine n’a qu’à bien se tenir.

La brigade anti-émeutes est largement dépassée quand il s’agit de contenir la foule et ses pancartes « ALISHA 23 DEIN TRIKOT » (comme on dit dans le Pays de Vaud).

Ah, on oubliait: ceci est l’emplacement réservé à la photo de nos frites et bière obtenues grâce au fameux “catering bon” (sic) mentionné dans la prochaine rubrique. Comme il fallait faire la queue, obtenir un post-it vert avec l’inscription « frites » griffonnée au crayon (on n’invente rien) et refaire une fois la file pour n’obtenir qu’une des deux denrées si ardemment désirées, on s’est finalement dit que manger c’était tricher et on n’a pas loupé la deuxième mi-temps. Bien nous en a pris puisque ladite mi-temps contenait tout de même deux tiers des buts.

Les chiffres à Bakou (ou à deux balles)

ZÉRO. Comme l’enjeu de ce match pour les deux équipes aux prises à Lausanne. Et au vu du rythme de sénateur président des États-Unis en exercice imprimé à la partie, les joueuses étaient au courant. La Suisse était d’ores et déjà assurée de terminer en tête du groupe et donc d’être promue en Ligue A (en plus d’être qualifiée d’office pour l’Euro) et l’Azerbaïdjan n’avait plus rien à espérer. Vous n’avez rien compris ? C’est parce que vous n’avez pas lu cet article. WordPress nous signale qu’on a atteint notre quota mensuel d’auto-promotion un poil gênante, on arrête.

UN. Comme le nombre de bon alloué à chaque personne pour un snack/boisson gratuit(e) au stade, à condition d’être TRÈS patient, on vous en parlait plus haut. L’important était de limiter son utilisation au jour du match (pour éviter de gigantesques déferlements de hooligans sur la Pontaise pendant le reste du mois de juillet) et surtout à sa version papier. C’est bien connu, on peut utiliser une capture d’écran à l’infini alors qu’on ne peut imprimer une page sans signe particulier ou code QR unique qu’une seule fois…

À ne pas confondre avec le Traiteur voucher qui n’a rien à voir. Pas facile le français fédéral.

CENT MILLE. Comme le nombre de supporters présents à la Pont… euh ah non. Le nombre de followers de la Nati féminine sur Instagram. C’est-à-dire 169 fois moins qu’Alisha Lehmann à elle toute seule. 169, à vue de nez, ça doit aussi être le nombre de minutes de jeu qui séparent la néo-Turinoise d’une titulaire à part entière en 2024. On a d’ailleurs pu constater une fois de plus que la popularité de la native de Tägertschi est malheureusement inversement proportionnelle à son apport sur le terrain.

Représentation graphique du nombre hundertusig.

L’anecdote I

On faisait des recherches statistiques dans le cadre d’un article sur l’Euro masculin, cet obscur tournoi de troisième zone que vous avez peut-être suivi du coin de l’oeil ces dernières semaines, et on est tombé sur un truc marrant. Figurez-vous qu’Inka Grings, ancienne sélectionneuse de la Nati débarquée en novembre dernier, est la co-meilleure buteuse de l’histoire de l’Euro féminin avec 10 réussites ainsi que la meilleure buteuse des Euros 2005 et 2009 au cours desquels elle a marqué tous ses goals et soulevé le trophée avec l’Allemagne. Quant à Pia Sundhage, c’est en 1984 qu’elle a réalisé le doublé vainqueur-soulier d’or de l’Euro (4 buts) avec la Suède. Il faut avouer que pour tenter de réitérer cet exploit depuis le banc suisse en 2025, il faut vraiment aimer se mettre en danger.

L’anecdote II

La Juventus comptera deux nouvelles joueuses suisses la saison prochaine. Viola Calligaris, qui a transformé son prêt depuis le PSG en transfert permanent, et Alisha Lehmann, qui a… suivi son compagnon Douglas Ruiz depuis Aston Villa. Au-delà du nombre impressionnant de followers masculins que va gagner la Juve féminine sur les réseaux, ce genre de transfert groupé a de quoi surprendre nos médias peu habitués au foot féminin et ses nombreux couples évoluant sous les mêmes couleurs.

Il s’agit surtout du premier transfert de couple hétérosexuel de l’histoire, nuance.

Si le match était une bière

C’est d’ailleurs le seul type de pression qu’on peut associer à cette performance minimaliste de la Nati face à une équipe faiblissime (à l’exception de son impressionnant dernier rempart Aytaj Sharifova) dont les plans n’incluaient pas nécessairement de jouer sur plus d’une moitié de terrain.

Quand tu te fais racheter par Carlsberg, pas besoin de préciser que tu manques un peu de caractère.

Et sinon dans les tribunes ?

En dehors de la Coupe du monde 1954 et peut-être de ce LS-Servette de 1999 (et de sinistre mémoire), auriez-vous imaginé qu’il soit un jour ardu de se procurer un billet pour assister à une rencontre à la Pontaise ? Eh bien ce fut le cas, cherères lecteurices ! Initialement annoncée pour le 11 juin à 14h, la vente a finalement été reportée au 20 juin à la même heure (panne de wifi à Muri ?). En plein Euro masculin, moins de 24 heures après le deuxième match de l’autre Nati. Bref, passer inaperçu, mode d’emploi.

En même temps tous les yeux étaient forcément braqués sur Lausanne puisqu’aucune autre enceinte suisse n’accueillait quoi que ce soit de palpitant cet été.

Finalement, l’ASF semble avoir les mêmes objectifs avoués pour cette équipe que la conférence du Birkenstock Bürgenstock le mois dernier: un groupe de réflexion qui caresse le fol espoir de déboucher sur un groupe de travail qui risquerait carrément d’aborder le sujet principal du débat (à la rigueur). Non, mais c’est tout bon hein, c’est pas comme si on accueillait l’Europe entière dans nos stades dans moins de douze mois.

Bonne nouvelle toutefois: les 2222 spectateurs du Stade Olympique ont tous pu redescendre à la gare en même temps.

La minute Johan Djourou

Etant donné que le meilleur ami de la verticalité et des liaisons foireuses (en phonétique donc) est maintenant officiellement employé par la Nati féminine, on a d’autant plus de raisons de conserver le nom de cette rubrique.

On ne peut vous citer aucune de ses sorties (il était trop loin), mais on peut vous le montrer:

« – Dis donc Johan, ils nous ont collé une sacrée Daube en guise de stade pour ce soir, non ?

– Je sais Marion, mais il fallait bien donner un susucre aux Romands. Fais semblant de rien et continue de sourire surtout. »

La rétrospective du prochain match

Euh ben non, c’est fini en fait. Oui, la Pontaise avait été soigneusement sélectionnée pour accueillir le bouquet final de ces qualifications pour l’Euro 2025 ! D’ailleurs la banderole qui flottait à l’entrée du stade au mois de juin avait l’air de nous dire que même le mandat de capitale olympique de la ville arrive à son terme. Voilà qui expliquerait bien des atermoiements organisationnels, notamment au niveau du non-accueil de l’Euro 2025.

Ceci est évidemment un montage, le ciel n’est jamais bleu et blanc au-dessus de l’antre du SLO.

Comme on n’a aucune idée de ce qui attend Vallotto et Cie dans les prochaines semaines, on vous laisse avec ce passage formidable du non moins prodigieux* Fever Pitch (1992), autobiographie de Nick Hornby contée à travers la relation de l’auteur avec le football en général et Arsenal en particulier (et donc par extension avec l’échec), et une pensée pour tous les fans de la Nati qui auraient la mauvaise idée de décéder avant le début de l’Euro:

En plus maintenant au foot on peut même casser sa pipe pendant des playoffs…

*À l’exception peut-être des passages où la gent féminine est (fort maladroitement) mentionnée. Oui, 1992 c’était il y a 32 ans et ça se voit. La Premier League s’appelait First Division, Liverpool restait sur 11 titres en moins d’un quart de siècle, City n’avait plus soulevé le trophée depuis 1968 et on commençait vaguement à se demander, après le drame de Hillsborough, si Highbury et les autres vieilleries qui servaient de stades ne devaient pas être modernisées…

Le « Sundhage » d’après-match

Quel stade pour accueillir le prochain match important de la Nati ?
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A propos Raphaël Iberg 186 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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3 Commentaires

  1. Raphaël Iberg : Après Yves Martin, c’est toi qui es le meilleur. Se charger du foot féminin sur Carton Rouge, c’est un exploit. J’espère que tu vas continuer.

    (Cela dit, et rien à voir : Fred Scola, à part ça un gars très sympa, est super soûlant surtout dans le match contre la Turquie; il nous a infligé une loghorrée à deux avec Madame « Voilà » sans rapport avec ce qui se passait sur le terrain; pour le match contre l’Azerbaïdjan, on a fini par switcher sur la TSI…)

    • Tetcheu un grand merci ! On dirait presque pas qu’on s’est fritté par email il n’y a pas si longtemps ! 😀

      Yes, je vais continuer ! Dès la semaine prochaine d’ailleurs, départ pour Lyon et les JO jeudi matin.

      Je trouve aussi que Fred Scola est éminemment sympathique et franchement agréable à écouter même, mais effectivement pas toujours hyper pointu. Et je plussoie pour Sandy « voilà » Maendly. C’est compliqué. Il faut vraiment espérer qu’il ne se passe rien de nouveau dans le jeu pendant 5 bonnes minutes quand elle commence une phrase… Mais j’espère que c’est une question de pratique et qu’elle sera prête pour l’Euro ! Par contre mardi c’était pas Henriod au commentaire ?

      • Ouais bon, calmos, c’est juste que j’ai pas la mémoire des noms… Pour le match, oui, c’était Henriod et c’était juste un peu moins soûlant. Mais pour l’Euro, de grâce, il faut que la RTS choisisse quelqu’un d’autre que le duo Scola-Maendly.

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